Glissière
Elle
a repris confiance. Elle va mieux. Elle trace sa route. Ça roule !
Elle
est retombée sur des vieilles notes. Et cette fois-ci, elle en a ouvert une.
Elle croyait que c’était bon. Qu’elle était assez armée pour replonger dans les souvenirs. Au travers les mots. Pour en garder que le meilleur.
Non.
Erreur.
« Mon amour, mon doux, mon
tendre, mon merveilleux amour…
voilà 10 ans que nous nous sommes mariés et
déjà 17 ans que tu es entré dans ma vie, la moitié de ma vie à cheminer avec
toi.
Il y a 10 ans je t’ai fait
plusieurs promesses et je crois que le contrat est pleinement rempli. Il y a 10
ans on décidait de construire ensemble notre route du bonheur. Il y a 10 ans je
savais pas encore vraiment ce que c’était le bonheur en fait. Le bonheur c’est
d’être ensemble à programmer notre prochain road trip pendant que notre fille
danse et que notre fils rit aux éclats en imitant sa sœur. Le bonheur c’est de
partager un livre tous les 4 avant le dodo. Le bonheur c’est aussi le silence
dans tes bras quand les enfants sont couchés et dorment plus de 3h d’affilé !
Car aujourd’hui, 2 rayons de
soleil sont venus nous rejoindre sur le chemin, compléter notre famille,
illuminer nos vies et raccourcir nos nuits.
Aujourd’hui, je suis comblée grâce
à toi et aux 2 magnifiques enfants que tu m’as donnés.
Aujourd’hui je me sens entière,
remplie de joie et d’amour, pleine de confiance en l’avenir et je ne changerai
pas un détour de notre histoire puisque cette route nous a amené ici et
maintenant.
Au cours de ces 10 ans, nous avons
suivi notre petit bonhomme de chemin d’abord à deux, pendant 5 ans, puis à
trois et enfin à quatre. Ce chemin est pittoresque, une route toujours en
travaux comme au Canada, une piste au milieu de la brousse comme au Cameroun, un
chemin de terre sinueux comme en Corse, une allée pavé où on doit faire
attention où on met les pieds comme à Cadaquès, une ruelle crevante qui montent
comme à Porto, une route à tunnel comme en Norvège, un canal paisible comme à
Venise, une avenue grandiose comme à Moscou ! Mais jamais une autoroute, nous
avons traversé des paysages inoubliables et grandioses, parfois orageux mais
toujours colorés, remplis d’amour et d’émotions. La vie est belle avec toi ! Le
voyage est magnifique !
Aujourd’hui je voulais te dire à
quel point je t’aime. Tu es un homme merveilleux, beau, attentionné, généreux,
drôle, un partenaire exceptionnel, un papa formidable et je mesure chaque jour
la chance que j’ai de t’avoir dans ma vie.
Comme je suis heureuse de fêter
notre famille et tout ce temps passé à tes côtés.
Alors je voudrais renouveler ça
pour les années à venir... Disons qu’on refait le point dans 10 ans, contrôle
technique, pression des pneus et plein d’essence puis on resigne et on fêtera
ça à nouveau entouré des gens qu’on aime.
Oh Mon amour, mon doux, mon
tendre, mon merveilleux amour, je t’aime encore tu sais, je t’aime. »
Non.
Excès de vitesse. Sortie de route. Glissière.
Ça
marche pas encore. Ça fait juste mal. Plus qu’elle le pensait. Parce que,
putain c’est vrai tout ça. Elle l’a pensé. Elle l’a vécu. Elle l’a voulu.
Et
aujourd’hui tout est redessiné. La route est bien différente. C’est pas le même
level. Qu’est-ce qu’elle est devenue ???
Ça
ressemble à quoi maintenant ?
Ces
mots qu’on lui a dits… qui viennent se télescoper dans sa tête.
« J’allais
pas te laisser crever dans ta merde » Rappelle-toi... Comment on peut dire ça à quelqu’un qu’on aime ou qu’on a
aimé ? Rappelle-toi. « Si j’ai fait ça c’était pour te faire sentir
coupable ». Rappelle-toi. Il était ça aussi. Rappelle-toi. C’est pas comme
ça que tu veux être aimée. « En fait, au fond, tu voulais peut-être pas
être mère ». Elle y pensait moins à ces maux-là. De l’eau a coulé sous
les ponts. Elle y pensait moins. Elle en avait moins besoin. Elle est encore en
colère finalement. Mais elle s’est adoucie cette colère. C’est pour ça que ça
fait si mal aujourd’hui. C’est plus facile quand on est en colère. Quand on
voit que la partie noire, moche et brûlée de la médaille. Va pas regarder de
l’autre côté. T’es pas prête encore. Rappelle-toi.
La
route est belle aussi maintenant. La destination est inconnue mais de toute
façon, c’est pas parce qu’on a une idée de la destination à atteindre qu’on y
arrive vraiment.
Et
puis ces mots qu’on lui a dits… qui viennent se télescoper dans sa tête.
« c’est
maintenant qu’il faut trouver quelqu’un. Parce qu’après c’est trop tard. Tu vas
finir seule. Et c’est dur de vieillir seule. » Elle en sait rien.
Jusqu’ici tout va bien. Elle a pas envie d’être accompagnée. C’est pas
nécessaire en fait ! En même temps, des fois c’est dur… C’était dur aussi
avant putain ! Rappelle-toi.
La
route est belle maintenant. Elle a un GPS. Mais l’itinéraire indiqué n’est pas
toujours celui qu’elle prend.
Ces
mots qu’on lui a dits… qui viennent se télescoper dans sa tête.
« Si
tu veux faire le chat, je veux bien faire la souris ». Mais non garçon.
Elle veut pas jouer au chat et à la souris. Ça l’intéresse pas. Elle a pas
envie. Et puis, t’es bien sûr de toi ? t’as vu ce qu’il fait le chat avec
la souris ? elle a un bon potentiel de chat. Modèle chat sauvage.
La
route est belle maintenant. Seule ou accompagnée. C'est pas interdit de prendre des auto-stoppeurs non ?
Ces
mots qu’on a lui dits… qui viennent se télescoper dans sa tête.
Sa
fille : « t’as les yeux brillants maman ». Ouais. C’est devenu
une pleureuse. Elle a pas envie que ses enfants la perçoivent comme ça. Mais
c’est elle aussi maintenant. La petite voix de son fils : « tu
pleures maman ? » Ouais. Elle aimerait bien pleurer moins. Elle
pleure quand elle est fatiguée. Quand elle est émue. Quand elle est triste.
Quand elle se sent seule. Quand elle est débordée. Quand elle se sent nulle,
incapable de rien. Quand elle se pète le dos à remonter la poubelle verte
archipleine dans l’escalier du jardin. Quand l’un de ses enfants pleure. Pour
le moment elle a de la chance, ils prennent un ticket pour se relayer parce que
sinon ce serait un vrai carnage. Elle pleure quand c’est beau. Quand ça passe
trop vite. Quand elle retrouve ses enfants. Quand elle les quitte. Quand ils
lui manquent et quand c’est trop dur toute seule. Elle pleure quand elle danse
aussi parfois. Quand elle rit avec eux. Quand la vie est belle. Cette maison aujourd’hui,
elle est pleine de rires. Mais elle est pleine de larmes aussi. Les siennes.
Alors c’est pas grave. Regarde. Regarde comme c’est beau ici. C’est plein de
vie. Elle a reconstruit de belles choses. Ses enfants sont formidables. Ecoute.
C’est la vie qui crie dans cette maison. Elle est vivante.
La
route est belle maintenant. Définitivement.
Le choix des mots… c’est quelque chose d’important pour elle. Elle les choisit. Elle
les pèse. Elle joue avec. Les mots. C’est la traduction de ce qui est. C’est le
pont entre soi et les autres. C’est le lien. Le liant. Les mots. Ceux qu’on
dit. Ceux qu’on ne dit pas. Le choix des mots. Les paroles s’envolent, les
écrits restent il paraît. Certaines paroles s’envolent pas tant.
Faut
faire attention à ce qu’on dit bordel !
Même moi en ayant quitté mon mari (pour quelqu'un d'autre) il m'arrive parfois d'être encore triste. Le gachis. La déception, les regrets, les remords. Et je suis du "bon" côté de la barrière. Mais ce n'était pas mon projet de vie. Gérer seule 2 enfants dans 42m² une semaine sur deux c'est dur au quotidien.
RépondreSupprimerJ'ai pleuré en lisant ton texte. J'ai mélangé ces larmes aux tiennes. Puis un sourire né et tout repart. Rien ne sait de quoi l'avenir sera fait. Merci à toi
RépondreSupprimer🫶🤘🫶
Supprimertoujours aussi émouvant ... je pleure aussi !
RépondreSupprimerTu as un regard et une écriture incroyable !